L'Artois d'un poète
Jean Le Roy, né à Quimper le 28 novembre 1894, vécut à Paris où il rencontra Jean Cocteau, Guillaume Apollinaire, ... Ajourné de la classe 1914, il s'engage néanmoins et rejoint le front dans les rangs du 37è RI, puis rejoint comme mitrailleur le 413è RI. C'est la boue du front d'Artois, où son régiment se bat lui aussi de septembre à novembre 1915 dans le secteur du bois en hache, qu'il décrit dans ce très beau texte. Jean Le Roy, Paul Carat, les gars de la 5è compagnie du 158è RI, exacte coïncidence de temps et de lieu. La boue, la nuit de Jean Le Roy, celles de Paul Carat, regards croisés d'un poète parisien et d'un paysan méridional. Jean Le Roy, alors au 414è RI sera tué le 26 avril 1918 d'une balle en plein front au Mont Kemmel, dans les Flandres.
Chanson du fortin
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Rappelez-vous les soirs boueux.
Nous passions à la queue leu leu
En trébuchant à chaque pierre,
Les marécages de Souchez,
Le grand hôtel des trépassés.
Soldat, soldat, tes pieds sont lourds,
La nuit est noire comme un four,
On supplie "pas si vite en tête".
Dans le boyau du Désespoir.
Soldat, soldat, la nuit est noire.
Là-haut, aux crêtes de malheur
Les fusées sont de grandes fleurs
Et dès le jour, par-dessus Angres,
Les noirs pylônes, dans le ciel clair,
Dardent sur nous deux yeux de fer.
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